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l'amour la mort

un jour, son apparition 
illumina la terrasse d’en face
s’installant dans le fauteuil
elle prit son livre dans les mains
et ne le quitta plus des yeux
jusqu’au soir

plongé dans ses tourments
il ne détecta pas sa présence
tout de suite

en quelques jours
la routine s’était installée
elle se montrait l’après-midi
dans la chaleur épaisse
glissant telle un fantôme
vers le même coin d’ombre
d’où elle ne bougeait plus
tête penchée sur le côté
regard hypnotisé par les pages

auréolée par la lumière blanche du soleil
il ne pouvait détailler son visage à contrejour
il l’imaginait jeune et belle triste
se consolant dans ses lectures
pour oublier
son amant l’avait quittée certainement
et la vie ne possédait plus de sens pour elle
pour lui non plus

toujours seule
personne pour venir la voir
seule la vieille servante
pour s’occuper d’elle

solitaire lui aussi
n’ayant envie de rien
et rien à faire
il la fixait des yeux
chaque jour
un peu plus

jamais elle ne fit un geste pour signifier
qu’elle avait perçu son manège
alors il l’aima de plus en plus fort
et un soir il se décida 
demain  il déclarerait sa flamme

cette idée l’asphyxia toute la nuit
le lendemain elle n’apparut pas

il sut alors qu’elle était morte
respirant brusquement de plus en plus mal
il mourut dans la journée

par hasard
ils furent enterrés tous les deux
côte à côte
au fond du cimetière
contre le vieux mur en pierre
rongé par les plantes

en quelques mois
le lierre recouvrit les deux tombes
d’un même manteau vert
comme pour les réunir à jamais

En souvenir de la tombe des frères Van Gogh à Auvers-sur-Oise
Voir une mise en scène avec une image IA créée pour le texte dans Poésie de l’Art

l’amour la mort

Un jour, elle apparut sur la terrasse d’en face, s’installa dans le fauteuil, prit son livre et ne le quitta plus des yeux jusqu’au soir. Plongé dans ses propres tourments, il n’avait pas détecté sa présence jusqu’alors. Au bout de quelques jours, il avait repéré la routine : elle se montrait dans l’après-midi, glissant comme un fantôme dans la chaleur épaisse, trouvait le même coin d’ombre et n’en bougeait plus, la tête légèrement penchée sur le côté, vers les pages. Il ne pouvait distinguer les traits de son visage à contrejour, auréolé par la lumière blanche du soleil. Il l’imaginait jeune et belle, triste, cherchant à se consoler dans ses lectures, ou bien à oublier. Son amant l’avait quittée, c’est sûr et la vie ne possédait plus de sens pour elle. Lui-même vivait un désespoir abyssal. Elle était toujours seule, personne ne venait la voir, à part une vieille servante qui s’occupait d’elle. Solitaire lui aussi et n’ayant finalement rien d’autre à faire, il la fixait des yeux chaque jour un peu plus mais jamais elle ne fit le moindre geste signifiant qu’elle avait remarqué son manège. Alors il l’aima encore plus fort. Un soir où, à son habitude, la servante vint la chercher à la tombée de la nuit, il décida de déclarer sa flamme dès le lendemain. Cette idée le tortura et l’asphyxia toute la nuit. Mais, le lendemain, elle n’apparut pas. Il comprit alors qu’elle était morte et se mit à respirer de plus en plus mal. Il mourut dans la journée. Par hasard, ils furent enterrés tous les deux cote à cote, au fond du cimetière, contre le vieux mur en pierre rongé par les plantes. En quelques mois, le lierre recouvrit les deux tombes d’un même manteau, pour les réunir à jamais.

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Conseil: une fois sur les poèmes, passez d'un texte à l'autre avec les flèches du clavier