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indices

de sa fenêtre de train il regarde fuir
sous les nuages immobiles
les couleurs d’automne et les lignes
prairies et collines mêlées
arbres violets et toits rouges
devant lui tout est courbe
en bas tout s’en va
en haut rien ne bouge

il voit les ombres rases du soir
s'étendre comme une pieuvre
la pique soudaine d’un clocher
recevoir des offrandes muettes
il voit les frondaisons agitées des bosquets
lieux secrets d'amours inavouées
il imagine toutes ces vies violées
par son regard TGV
flèche éclair et magique
qui transperce des plans de vie successifs

il voit tout voyeur insatiable
il ne voit rien
à défaut de certitudes il s’accroche aux traces
dans les champs les arabesques des tracteurs
dans le ciel le V des migrateurs
et le coton blanc des avions
et puis ici et là dans un hasard organisé
la fumée qui fuit des cheminées
le pylône crucifié des fils électriques
les rambardes comme des rails
les rangées de serres
les filets déployés des arbres fruitiers
l’horrible usine et la vieille ferme
les silos cathédrales
et partout ces barrières infinies
il ne voit que des taches et de l’eau
des morceaux de vie des bribes

pas le temps de voir les hommes
trop petits à cette vitesse
on ne voit que leurs indices
et les animaux qui s’accrochent à la terre

et il pense alors aux indices de sa vie

ambiance train

ambiance train fin de journée
de quai en quai ça bouge
ils vont quelque part c'est sûr
mus par un désir un besoin
ils s'y pressent sans détour
avec de gros sacs
ou de petites larmes cachées
chacun sait pourquoi il est là
ou fait semblant de s'en contenter
c'est rare d'errer dans une gare
une gare ça aiguille ça bourdonne
ça distribue les chemins
ça ne pense pas une gare
ça bruisse
ici on ne vaque pas on va
et puis la machine s'ébranle
emportant toutes ces vies dans ses mains
destins unis par le même bruit balancé
tous dans le même train train
ils se disperseront arrêt après arrêt
comme un jeu de cartes envolées
pétales de marguerite effeuillés
par le souffle mécanique du train
trieur de hasard et de destinées
je n'aime pas le train
ni la fin de journée
Conseil: une fois sur les poèmes, passez d'un texte à l'autre avec les flèches du clavier