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nostalgie

quand les voix aimées se seront tues
elles ne laisseront de leur bruit
que le souvenir aigu
des brèches de la vie

plus jamais les rêves de la nuit
ne s'ancreront aux habits de l’enfance
ni les jours enfuis
aux rives de l’absence

à quoi bon pleurer
ou tourner en rond
les bons moments passés
jamais ne reviendront

c’est ainsi que naît la nostalgie
un envahissement progressif
comme un voile de brume
ruisselant sur l'âme

on ne meurt pas de nostalgie
avec elle on vit tous les jours
elle te suit comme une ombre
fidèle jusqu’à la tombe

même si au souvenir
des regards rompus
des rencontres inabouties
le regret sournois s’insinue

elle te dira que tu n’as pas vécu
comme tu l’aurais voulu
mais vollà la vie se nourrir
de joie de manques et avancer

chaque émotion produit une graine
chaque sourire un bout d’oxygène
ainsi se construit le labyrinthe
d’un destin à nul autre pareil

à la fin tu devras bien pourtant
assembler les pièces du puzzle
pour faire semblant de croire
à un accord possible

et si certaines éparses
ne trouvent pas leur place
dans le récit peint
entre en vide et plein

tant pis
c’est ainsi que tu vis
l’humanité de la folie
entre désir et nostalgie

Voir la mise en scène illustrée par 20 œuvres d'art contemporain dans Galerie Amavero

brume

je suis le voile du marin
enrobant le navire
pour lui dérober la vie
je suis l’humide gris
perlant de gouttes
sur le pont salé

porteuse de poisse
je suis la fatalité
faiseuse d’angoisse
à qui on finit
par s’habituer

quand je suis là
sans m’être annoncée
anxieux le marin
ne voit plus rien
silencieux aux aguets
l’oreille tendue
il écoute ausculte
car il le sait
je ne pardonne rien
ni l’invisible rocher
ni la boussole affolée

sur la cote floutée
le phare sans veilleur
peut se moquer de moi
mais que m’importe
où son regard porte
tenace obstinée
d’une infinie patience
je tisse ma toile
d’ombre et de destin
posément je déploie 
mon filet de mailles
à l’invisible ouate
enserrant ses proies

pour un temps incertain
au nom de l’indistinct
moi juge de la loi altière
j'abolirai la frontière
entre laideur et beauté
pour emmêler
sans remords
le jour et la terre
la nuit et la mer
la vie et la mort

Texte de Luc Fayard, inspiré par une photo de Bérangère Costa,

les mots que j'aime

je ferai un tapis des mots que j’aime
pour que tremblants tes pieds blancs et nus foulent
le grand désordre mué en poème
de ton âme chavirée par ma houle

j’accrocherai les mots que j’aime aux arbres 
pour qu’en marchant tu en tisses des fleurs
réunies en bouquets de rose et marbre
veinés de voluptueuses couleurs

les mots que j’aime voleront au ciel
pour qu’en suivant leur essaim tu transformes
les nuages crémeux comme le miel
en cerfs-volants dessinant mille formes

je ferai un voilier des mots que j’aime
pour qu'ils t'embarquent en mer avec eux
le soir nous réciterons des poèmes
au soleil roux se couchant dans tes yeux

et quand sonnera la fin de semer
je scellerai les mots que j'aime en moi
pour qu'ils créent la passerelle vers toi
où nous rêverons ensemble à jamais

Texte de Luc Fayard, illustré par Reading, de Julius LeBlanc Stewart et Les Chants de Maldoror, de Salvador Dali : voir les différentes mises en scène dans Galerie Amavero, dans Poésie de l'Art et dans instagram @lucfayard.poete

la vie la mer

les nuages bas
l’océan moutonne
dans ses plis
abolis
les crètes frissonnent
sous un ciel bien las

plus envie de rien
se laisser porter
par le vent 
le courant
pour tout oublier
sa vie son dessein

c'est l'esprit éteint
par la rêverie
du remous
qu'un corps mou
perdu dans la nuit
dérive sans fin

au matin pourtant
le marin secoue
sa carcasse
dans la nasse
il reprend sa roue
et son cap au vent

ainsi va sa vie
sillage de mer
non tracé
cœur lassé
par le goût amer
du temps asservi


Texte : Luc Fayard
inspiré de
Pleine mer, temps gris, de Charles-François Daubigny

la raison du poète

je crée mes souvenirs
comme un artiste repeint sa toile
l’avenir est un élixir
diluant le présent dans le passé

je ne suis que chimie
de pensées programmées
les mots mentent
ils existaient avant moi
quand tout était différent

mon cœur s’emballe sans raison
vers tous les cardinaux
j’ai perdu le goût de tout
je souris sans passion
ne contemplant rien d’autre
que l’intérieur de moi

et pourtant je respire j’existe
mais pour quoi
quel destin pour un grain de sable
volant au moindre frisson marin
les poussières ne se donnent pas  la main

croyant vivre la même aventure
les hommes s'agglutinent
pour flotter dans les courants tièdes

la réalité n’a pas de géométrie universelle
la vérité est un leurre de l’histoire
l’amour un rêve fatal à l’indépendance
aveugle j’avance en automate

monté sur quel ressort
ni justice ni compassion
ni revanche ni haine

peut-être simplement
l'impérieux  désir de beauté
drapeau blanc surnageant du naufrage
triangle vert coiffant la soucoupe des nuages
seul chemin vers une transcendance
qui se passerait de l’histoire et des signes

sans nul besoin de raison folle
un chemin sans étoiles
qui est tout
sauf une ligne droite

Diplôme d'Honneur - Prix de poésie Europoésie-Unicef 2023

Texte : Luc Fayard
voir la version illustrée par
Le Voyageur contemplant une mer de nuages, de Caspar David Friedrich

terminus

étrange destin
pour l’homme
approcher de la fin
sans le vouloir
pas après pas
marche inéluctable
au rythme du cœur
horloge atomique
au décompte inlassable
chaque pulsation
est une croix de plus g
gravé sur le livre
par l’assassin comptable
des jours achevés

quel objectif étonnant
un train direct sans arrêt
mais à durée du trajet
indéterminée
chacun son terminus
règle valable pour tous
les grands les minus
les sereins les atrophiés
galériens enchaînés
à la même certitude
ramer vers l’inconnu
et le jour de l’arrêt final
à la station néant
où seul tu descendras
il fera noir
pour toujours

Finaliste du Diplôme d'Honneur - Concours Europoésie-Unicef 2023

Texte: Luc Fayard
voir une version illustrée par l'IA ici ou

sans artifice

parfois les couleurs
parlent au cœur
sans artifice
sans détour
porteuses de joie
de renaissance
elles exhalent
des vibrations
en ligne droite
dans un désordre gai
mais constructeur
où l’on se tient la main
face à son destin
la vie nous appartient

barques sur la grève

étonnantes disproportions
entre humains et barques
bateaux sur la plage
et ceux sur la mer
homme chétif
tu es grain de sable
poussière de vent
jouet dans les bras
des puissances marines
tu peux t’agiter
elles gagneront toujours
range tes barques
tes filets
va prier les saints
que la mer t’épargne

destin

massif concentré silencieux
assis au fond
dans un coin
il ne voit que ses cartes
le monde disparaît pour lui
il commence même à s’effacer
son destin se joue
dans sa main
une fois de plus
il s’interroge
la vie est un pari

silence

épaules ramassées
coudes posés
peu importe le jeu
pas d’argent
sur la nappe
qu’on soit
méthodique ou intuitif
parfois la vie se résume
à des figures
sur une carte
le silence
et la confrontation

peuple cheval

peuple cheval
l’infini des plaines
ne lui suffit pas
il marche en groupe
il galope il rue
secoue sa crinière
naseaux ouverts
le peuple cheval
s’enivre de l’air
soleil ou crachin
il avance fièrement
par tous les temps
quel sera son destin

la mer n'est pas calme

la mer n’est pas calme
elle vaque sans arrêt
tout bouge en elle
et mon âme avec
on ne chérit pas la mer
on la vit au fond de soi
avec les mêmes déchirements
les mêmes joies
jamais elle ne se taira
moi non plus

panthère

elle me regarda
longtemps
fixement
sans bouger  
moi non plus
je ne bougeais pas
dans ses yeux je vis
défiler ma vie
et le peu de cas
qu’elle en faisait
finalement
elle me jugea
insignifiant
et s’en alla
sans même 

la ville la nuit

la ville la nuit
rouge et noir
traces de lumière
halos croisés des destins
filandres de vies
filant ailleurs
ou se terrant trop sages
la ville la nuit
monde de blocs
et de passages

alchimie

entrailles de la terre
ou de l’âme qui erre
sans soleil
c’est pareil
seule solution
pour exister
voir toutes les routes
s’ouvrir en même temps
prendre son temps
choisir son destin
sa voie dans les étoiles
créer un point de plus
qui brillera dans le ciel

tu ne crois plus

quand la nuit se disloque
vieille breloque
tu ne crois plus aux mots
masques menteurs
tu ne crois plus à la réalité
cinéma d’auteur
tu ne crois plus à l’autre
rétif miroir de toi
tu ne crois plus aux dieux
prégnants contes de fées
tu ne crois plus à l’amour
dénudé par les ans
tu ne crois plus à la vie
vidée de ses sens
et surtout surtout
tu ne crois plus en toi
et puis voila
le jour se lève
tu es toujours vivant

lac étrange

décor sombre pays étrange
aux multiformes entrelacs
ta vie se déroule sans toi
dans un rêve de peau d’orange

un lieu d’acteur et spectateur 
que tu hantes passant blasé
tout y est de travers raté
absences rendez-vous sans heure

tu vois mille chemins balourds
dans ce bazar de cinéma
se proposer à tes pieds las
embourbés à ce carrefour

la tête levée vers le ciel
tu voudrais indices et signes
mais les nuages sont indignes 
avares et caractériels

c’est à toi de les enfanter 
idiot tu n’as donc rien compris 
c’est dans tes pas que se construit 
le chemin de la liberté

haies

tout ce qui existe 
est là-bas présent
derrière la haie 
caché mais vivant
il faut y aller 
quitte à s’écorcher
ôter ce qui gêne 
à coups d’oxygène
et quand on y est 
tout a permuté
 
rien n’est révélé naturellement
tout évolue dans un temps progressif
vivre n’est qu’un glissement agressif
de l’ombre des réalités des gens
 
il faut imaginer ce qui sera
rien ne reste figé ci et là
enseveli pêle-mêle 
dans un passé poubelle
 
je hais les haies
elles sont partout 
devant derrière
sur les côtés
 
la vie est un enclos de reclus
il faudrait être singe ou kangourou
quand on est limace ou serpent
il faudrait être gourou
quand on est mouton
bêlant ses reproches et ses regrets
sa malvoyance et ses fragilités
 
l’homme est un animal qui pleure
cloitré il ne saura jamais
son talent pour l’éternité
dans le grand tintamarre des heures
 
je voudrais être un grand oiseau
volant sur les arbres les eaux
les petitesses les soupçons 
vers l’hypnotisant horizon 
toujours plus loin toujours plus fort
comme sont la vie et la mort

homme d'ombre et d'onde

avant
j’étais un homme d’ombre et d’onde
pleurant seul
ballot d’aube
et me voici lumière active
chassant l’inutile
fuyant les prémices obscures de la mort
long fut le temps où je cherchais l’indicible
au-delà de la poussière des jours
aujourd’hui je cours
hâté par les battements du coeur
peuplant le présent d’un corail de pacotille
futile barrière anti-futur anti-noir anti-tout
j'étais larve du soir fantôme d’attirance
et me voici prévisible espérance

fallait-il hier se fondre 
dans les couleurs neutres 
du feutre automnal
ou faut-il maintenant 
vibrer bêtement 
sur des fréquences arc-en-ciel
entre douleur et fureur
je suis à jamais inachevé
comme le plus petit des hommes
j’aime cette ressemblance à la communauté
j’appartiens à l’humanité 
par mon incomplétude structurelle
plus je suis imparfait plus je m’ancre
quand je crie mon impuissance 
l’écho de la terre se pare d’infini

ma solitude est multiple
mon désespoir infime
mon avenir sans surprise
mes mains fabriquent ma tour d’ivoire
tandis que sèche mon coeur
je vois une vie sereine 
avec des yeux de comptable
quand je vivais l’errance 
avec une âme de poète

la marque du bonheur 
imprime mon sourire
ma peau est lisse 
comme un bébé
j’ai perdu mes crevasses 
en même temps que mes cheveux
je marche droit vers la fin 
avec une force joyeuse et contrôlée
la route monte de plus en plus
le soleil me frotte le dos
il me dessine une ombre gigantesque
je reste coi
les oreilles bouchées de certitude

un jour peut-être 
se marieront mes deux destins
mon passé d’abondance et d’ébauches
et mon présent de fer apparent
ce jour-là gare je serai le roi de la terre
je n’aurai plus qu’à mourir et comparaître

alors je dirai à Dieu
Seigneur, me voici
pêcheur à occurence multiple
(vous seriez jaloux d’un saint)
j’ai cherché et suivi toutes les voies qui mènent à vous
j’ai rêvé et j’ai agi
j’ai aimé et j’ai créé
j’ai pleuré et combattu
j’ai écouté et j’ai dirigé
j’ai donné et entrainé
mes rêves me rapprochaient de vous
mais dans une forme d’inutilité
mes actes me rendaient insouciant
mais je perdais le sens du bien
l’amour m’a comblé
dans un quotidien douteux
mes pleurs étaient des gouttes d’insuffisance
mes combats une vaine agitation
et quand j’ai voulu emporter d’autres derrière moi
j’ai souvent quitté les routes de la théorie
pour un chemin ou tout est discutable

Seigneur me voici
que fallait-il faire
et Dieu de sa voix caverneuse et douce
me donnerait enfin cette réponse
que je ne connais pas
et qu’il faut que j’attende encore
esclave combattant avec ses deux vies
homme fatal de la dichotomie
imparable amant du futur antérieur
funambule de l’inestimable impossible
gratteur de racines incomestibles
chercheur  d’ailleurs successifs
vasectomisé génétique du chromosome bonheur

belzébuth

tut tut tut
la cahutte
sur la butte
belzébuth
prend son luth
ou sa flûte

tut tut tut
belzébuth
persécute
mi sol ut
ça chahute
c'est son but

on l’bizute
mais la brute
belzébuth
bête en rut
a dit zut
à la pute

belzébuth
tout hirsute
sous sa hutte
a l’scorbut

on dit chut
plus de flute
ni de luth
c’est la chute
la culbute
plus de lutte
belzébuth
sans volute
parachute
azimut
Conseil: une fois sur les poèmes, passez d'un texte à l'autre avec les flèches du clavier