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fouiller la surface (3)

j’écris pour fouiller la surface indicible
des choses et des gens
dans la sphère de l’invisible
au-delà des mots et des traces

mes mots ne sont pas des mots
ils sont la rencontre improbable
entre l’âme et la beauté
la volonté imparable
de peindre l’indiscernable hybride
de sentiments et d’émotions

je ne sais pas crier
tout juste murmurer
ma sincérité mon désir immanents

je cherche à créer
les rêveries d’un tableau abstrait
le foisonnement d’un paysage de recoins
la larme limpide d’un prélude en do majeur
les cieux aux nuages éclatés

je veux décrire
les yeux transparents grand ouverts
la main douce poussant un soupir
la mort amère si attirante
les rages de l’être à tous les âges
les folies de la vie tournis
j’écris pour me sauver de mes tourments
stopper leur cycle un moment
les voici suspendus en l’air par mes mots
qui les empêchent de retomber

d’un œil je les vois prêts à se ruer sur moi
alors je continue d’écrire en apnée
plongeant toujours plus loin
dans un monde sans fin

quand j’écris j’ai peur de mes mots microscopiques
mais je continue tant pis
porté par un espoir improbable
écharde de bois transocéanique
petit caillou à la fois dense et léger
chassé par le vent
cerf-volant hésitant
après s’être détaché de son fil
et qui tournoie en montant

mes mots forment une myriade
de filandres fécondes
plus fortes que la matrice des heures
une kyrielle de notes
frappant les cœurs des bouts du monde
où je ne suis jamais allé

j’écris pour lancer des passerelles entre les êtres
lignes de vie d’un bateau cherchant son cap
je ne veux pas d’échelles ni de solutions
je veux des rêves de la vibration

voile s’évanouissant à l’horizon
mon texte va m’abandonner
ayant gravé en moi un sillage profond
hors de ma vue il vivra à jamais

j’écrirai encore et encore jusqu’à ma mort
et ce jour-là mes mots d’amour et d’or
je les serrerai contre moi
je les emporterai avec moi
qui sait à qui ils pourront profiter

les nuages sauront-ils les aimer ?

version publiée dans elle joue la nuit, c'est-à-dire remise en vers livre de la version prose qui a reçu le 1er prix du concours Amavica 2022 - Mille poètes en Méditerranée - catégorie Prose poétique

fouiller la surface (2)

j’écris pour fouiller la surface
des choses des gens indicibles
dans la sphère de l’invisible
au-delà des mots et des traces

rêveries d’un tableau abstrait
foisons d’un pays louangeur
tons de prélude en do majeur
cieux aux nuages éclatés

les mots m’empêchent de respirer
plongeant toujours plus loin
dans ce monde sans fin
j’écris mes visions en apnée

regard transperçant
main douce cachant un soupir
rages d’être torticolis de vivre
mort amère amer aimant

les mots cachent les tourments
les sons les camouflent
en appui sur le souffle
pour les contenir un moment

myriade de filandres fécondes
plus fortes que la matrice des heures
kyrielle de notes frappant à cœur
les bouts inconnus du monde

mes mots espoirs microscopiques
cailloux chassés par le vent
tournoyants cerfs-volants
échardes de bois transocéaniques

lignes de vie d’un navire pantelant
ni solutions ni échelles
je lance des passerelles
entre le rêve et le vibrant

mon texte va m’abandonner
voile s’évanouissant à l’horizon
gravant en moi un sillage profond
hors de ma vue il vivra à jamais

j’écrirai encore jusqu’à ma mort
et ce jour-là mes mots d’amour et d’or
tout contre moi je les emporterai
qui sait à qui ils pourront profiter

les nuages sauront-ils les aimer

version réécrite en vers de la version prose poétique (version 1) qui a reçu le j’écris pour fouiller la surface indicible
des choses et des gens
dans la sphère de l’invisible
au-delà des mots et des traces

mes mots ne sont pas des mots
ils sont la rencontre improbable
entre l’âme et la beauté
la volonté imparable
de peindre l’indiscernable hybride
de sentiments et d’émotions

je ne sais pas crier
tout juste murmurer
ma sincérité mon désir immanents

je cherche à créer
les rêveries d’un tableau abstrait
le foisonnement d’un paysage de recoins
la larme limpide d’un prélude en do majeur
les cieux aux nuages éclatés

je veux décrire
les yeux transparents grand ouverts
la main douce poussant un soupir
la mort amère si attirante
les rages de l’être à tous les âges
les folies de la vie tournis
j’écris pour me sauver de mes tourments
stopper leur cycle un moment
les voici suspendus en l’air par mes mots
qui les empêchent de retomber

d’un œil je les vois prêts à se ruer sur moi
alors je continue d’écrire en apnée
plongeant toujours plus loin
dans un monde sans fin

quand j’écris j’ai peur de mes mots microscopiques
mais je continue tant pis
porté par un espoir improbable
écharde de bois transocéanique
petit caillou à la fois dense et léger
chassé par le vent
cerf-volant hésitant
après s’être détaché de son fil
et qui tournoie en montant

mes mots forment une myriade
de filandres fécondes
plus fortes que la matrice des heures
une kyrielle de notes
frappant les cœurs des bouts du monde
où je ne suis jamais allé

j’écris pour lancer des passerelles entre les êtres
lignes de vie d’un bateau cherchant son cap
je ne veux pas d’échelles ni de solutions
je veux des rêves de la vibration

voile s’évanouissant à l’horizon
mon texte va m’abandonner
ayant gravé en moi un sillage profond
hors de ma vue il vivra à jamais

j’écrirai encore et encore jusqu’à ma mort
et ce jour-là mes mots d’amour et d’or
je les serrerai contre moi
je les emporterai avec moi
qui sait à qui ils pourront profiter

les nuages sauront-ils les aimer ?

version remise en vers livre de la version prose qui a reçu le 1er prix du concours Amavica 2022 - Mille poètes en Méditerranée - catégorie Prose poétique

vivre

penser qu’on peut exister
comme un diaporama où la pensée nage
sur l’océan bleu des mirages
créés d’instants juxtaposés

dans une vie multi strates
croire à l’obligation d’un sens
créé par le flux des convergences
quand ne vivent que dérives disparates

on voudrait s’imaginer
habitant d’un monde récent
on n’est que nervure de présent
dégoulinant de passé

dans la vie informe
rien ne se crée
rien de secret
ni les espoirs ni les candeurs 
ni les sourires ni les malheurs
ni les passions ni les regrets
tout se transforme 

même l’amour n’est plus ce qu’il était
alors dites-moi
qui suis-je 
sinon l’écriture d’un point d’interrogation
orthodoxe de la fluidité
paradoxe de la futilité

plus on s’interroge moins on sait
et plus on se persuade qu’on existe
sans savoir où on va
ni pourquoi on est là

qui peut me donner l’ambition
d’être au-delà de moi
comment vivre ma vie d’émoi
dans cette impermanence
plus je passe et m’use
plus les questions fusent
quel est le sens de ma vie passée
qui peut me convaincre 
que je ne suis pas rien
que je suis vraiment

autre chose que 
la goutte d’écume chassée par le vent
l’écorce de terre pendue aux filandres
le zigzag de lumière dans les méandres
le jour et la nuit fondant lentement

autre chose que
les notes de musique s’élançant en spirale
les non-dits auteurs de tensions inutiles
le théâtre obscur du verbiage futile
le brouhaha grossier d’un monde qui râle

autre chose que 
ce cri noué dans l’âme
cette pensée en va et vient
cette répétition muselée
comme un bourdon qui plane

heureusement 
il me reste un territoire inviolé
mes rêves mes nuits 
tintamarre d’absurdités
mélange d’âges et de lieux
voilà peut-être la seule réalité
ce capharnaüm étoilé

vivre c’est rêver
mais je ne suis pas fou
on peut tout omettre
quand il reste la vie donnée 
la seule vérité
qui peut rendre heureux
le seul concert audible
ces yeux qui me regardent
comme si j’existais pour eux 
ils me sourient ils me gardent

à tous ces futurs je dirai
merci de me tenir en haleine
je ne sais pas où je vais mais
avec vous le voyage vaut la peine

tu ne crois plus

quand la nuit se disloque
vieille breloque
tu ne crois plus aux mots
masques menteurs
tu ne crois plus à la réalité
cinéma d’auteur
tu ne crois plus à l’autre
rétif miroir de toi
tu ne crois plus aux dieux
prégnants contes de fées
tu ne crois plus à l’amour
dénudé par les ans
tu ne crois plus à la vie
vidée de ses sens
et surtout surtout
tu ne crois plus en toi
et puis voila
le jour se lève
tu es toujours vivant

quand je serai vieux

quand je serai vieux
rongé par les lunes
je me souviendrai
des si mauvais jours
et je me dirai
les ans pèsent lourd
le chemin se serre
devant est si près
qu’on ne connait rien
ni même où on va
mes pas sur le sable
droit vers l’océan
où vont-ils ensuite
et pourtant je rêve
de ciel plage et mer
vieillir c'est marcher 
sans se retourner
dans un grand brouillard
qui s’épaississant
pose tout son poids
sur sa courte vie

oubliez-moi

grandiose
sublime
définitif
j’accepte de mourir
bien obligé hein
mais attention 
sans souffrir
ni finir gâteux
eh pourquoi pas
quand on désire très fort 
quelque chose
et que ça se produit
qui peut prouver 
d’où viennent
ce hasard télépathique 
ce miracle biologique
cet esprit œcuménique
qui sait

dans ces conditions calmes
mourir sans état d’âme 
ne serait rien d’autre
qu’un passage obligé
imperceptible changement d’état
une fois je respire
une fois je ne respire plus
à peine si l’on voit la différence
quelqu’un dirait tiens il est mort le vieux
comme s’il disait tiens il pleut
personne ne pourra discerner
ce grain de sable envolé
dans la tempête cosmique

seul souci
je ne veux pas faire de peine
à ceux que j’aime et qui m’aiment
à ceux-là je dis
oubliez-moi
vous allez voir
c’est plus facile qu’on croit
et rapide
oubliez-moi
un peu plus chaque jour
où que je sois
l’oubli tranquille et progressif
seule solution à la vie après la mort
oubliez même
que je vous aime
si mal d’ailleurs
que ça n’en vaut pas la peine
oubliez mon visage et ma voix
fragiles fusibles de l’être
oubliez mon âme aussi
incongrue sans relief
si peu inoubliable
mots volatiles
émois dociles

quand je serai mort
mon être sera
sans importance pour vous
soit il vivra sans vous
soit il n’existera plus
mais vous n’en saurez rien
oubliez les moments vécus ensemble
créations de l’atomique hasard
oubliez-moi 
de haut en bas
de dos de profil de face
oubliez-moi
sans effort
avec le temps qui efface
les minuscules traces
et quand vous m’aurez oublié
vous verrez
vous vivrez mieux
sans vous poser la question
de savoir si j’existe encore
quelque part

quand je serai mort
j’aimerai vous dire où je suis
je vous dirai
que je vous aime encore
que c’est vous 
qui m’avez fait exister
vos pas
votre souffle  
vos bonheurs
et même vos souffrances
qui devenaient les miennes
je n’aimerai pas mourir
sans avoir dit aux gens que j’aime
que je les aime
j’aimerai vous dire 
là-bas
dans cet ailleurs inconnaissable
que je pense à vous

mais du néant c’est difficile
et sinon
si jamais je pouvais vous parler
je serais sans doute surveillé
par un vieillard grincheux
comptable pointilleux
de mes grands et petits péchés 
quel ennui mon dieu

mes amis
un dernier mot
celui-là ne l’oubliez pas
même si vous devez oublier 
qu’il vient de moi
une expression tellement banale
qu’elle passera inaperçu
après tout ce temps perdu
je me sens moins nu
je sais enfin comment il faut vivre
moi-même je n’y arrive toujours pas 
autruche 
baudruche
mais je le sais
je le scande
il faut 
goû-ter l’ins-tant pré-sent
à tout moment
comme s’il était unique
sans après et sans avant
goûter d’un geste laconique
l’ici et le maintenant
du karma bouddhique
par essence par définition
le monde n’a pas de sens préexistant
c’est vous qui le lui donnez
respirez 
simplement
tissez vous-même
votre lien aux autres
devenez votre univers
en couleurs 
rose et vert
souriez 
c’est plus difficile
mais ça détend
faites le plein 
de l’instantané
je regrette tellement 
de ne pas l’avoir fait
pour moi c’est trop tard
un vieux ça ne pleure pas
ça geint
ça se souvient 
quand ça peut

je crois que je mourrai sans regret
mais pas sans peur
j’ai peur de la peur de mourir
je me vois essayant de me raisonner
si j’ai encore ma tête
voyons c’est simple
soit il n’y a rien et alors basta
paix aux morts et vive les vivants
soit il y a quelque chose
et ce quelque chose
prend tellement de formes inimaginables
foldingues 
énigmatiques
qu’il ne sert à rien de s’énerver

parmi les scénarios alternatifs
je me regarde et je me dis
peut-être pas tout de suite le paradis
mais l’enfer quand même non
ce n’est pas pour moi
j’opte pour la probabilité 
du purgatoire
en mesure conservatoire
mais combien de temps
on s’en fout
le temps n’existe plus
de quoi te plains-tu
homme veule et nu 

las des brumes

las des brumes
délabrées
l’enfant hume
l’air vicié

secouant
nez et tête
sur des joues
maigrelettes

il s’en va
respirer
tout là-bas
un air frais

infinis sept

7 secret magique cabalistique
saints de bretagne premiers immigrés
esther et ses belles prophétesses
péchés capitaux tellement attirants
thèbes et ses trop nombreuses portes
menorah chandelier bizarre avec tant de branches
elohim fatigué ajoutant un jour de repos
rayons du dieu soleil quand il t'éblouit
versets dans la sourate al-fatiha pas un de plus
époque archaïque des sages grecs chacun sa maxime
indicatif téléphonique international de la russie
nombre de chakras et de villes saintes hindoues
couleurs de l'arc en ciel 
étoile polaire et ses copines de la petite ourse
seven up youp la boum joyeux anniversaire
diacres ordonnés par les apôtres
ut et les autres notes ça suffit                     
années de malheur si tu casses un miroir
oumra période où tu marches tu marches 
naga le serpent dont tu dois te méfier
dormants d'éphèse jeunes et vieux
et pour finir bien sûr et pour toi 
la rose et ses foutus pétales

comme un son de renaissance inédit

quand la mer frustrée de ses va-et-vient
aura stoppé d’inutiles marées 
quand les sourires se seront lassés
d’avoir créé ce monde vide et plein

quand la fin de l’amour aura tendu
son manteau ouaté sur les âmes nues
quand la poussière suspendue en l’air
aura révélé de nouveaux mystères

quand la course du ciel sera courbée
par le poids des remords et des regrets
quand les nuages auront dit au monde
voici l’ultime ronde vagabonde

quand les collines là-bas et les monts 
auront tourné leurs obliques rayons
vers d’autres esprits objets et regards
que ceux des hommes lisses et hagards

je me tairai mes mots n’auront plus d’âge
ni mon cœur ni mon âme de courage

peut-être alors rompant le non-dit
tintera le chant d’un nouvel héraut
prolongeant son air d’écho en écho
comme un son de renaissance inédit

encouragé par lui on pourra

relancer la course des nuages
faire retomber poussière et vent
redresser la tête des montagnes
libérer le ciel en mouvement
caresser la mer et son tangage

et c’est ainsi que nait la nouvelle ère
abrupte qui renverse les chimères

dehors dedans

dehors
bleu blanc vert
couleurs prégnantes
avions filant
vers leur destin
joyeux cris d’enfants
montant de la vallée
les oiseaux discutent
revenus de loin
sans me dérider

dedans
rien ne sourit
mes sens reliés au monde
ne m’y ont pas attaché
je ne saurais jamais
qui je suis
spectateur de ma vie
toujours en attente
de quoi

chevauchées et clôtures

roulement lourd de la chevauchée 
plein soleil
la plaine et la poussière
la liberté et la contrainte
la fatigue et la joie
le bonheur peut-être

à bien y regarder pourtant
lourdes sont les selles 
dures et longues les jambes des cavaliers
implacable le mors en bouche des chevaux 
pour les tenir au carré
pas question de ruer
comme à côté d'eux les copains libres
là où le cavalier décide ils devront aller vivre

les chevaux s'ébrouent lentement tête baissée
ils savent tous que le soir advenu c'est sûr
ils seront enfermés par les mêmes clôtures
où les a mené ce brouhaha indompté

berceau

dors l’enfant dors
dors l’enfant d’or
propre et sanglé dans la blancheur
rentre ton petit pied sous le plaid
ferme tes yeux de poupée
envole-toi dans tes rêves purs

mais pourquoi veux-tu que je dorme
tu vois bien j’ai les yeux grands ouverts
parle-moi plutôt d’un autre monde
les gens s’aiment-ils chez toi
les enfants y reçoivent-ils des câlins doux et chauds
comme ceux de grand-mère quand elle se penche sur moi
leur raconte-t-on aussi des histoires étranges
sur les esprits des vallées qui reviennent vous voir
et que dit-on le soir à la veillée

dors l’enfant dors
tu as le temps de grandir
plus tard tu te diras
j’étais si bien bébé
dans mon berceau de bois sculpté
dors l’enfant d’or
l’autre monde peut attendre

belzébuth

tut tut tut
la cahutte
sur la butte
belzébuth
prend son luth
ou sa flûte

tut tut tut
belzébuth
persécute
mi sol ut
ça chahute
c'est son but

on l’bizute
mais la brute
belzébuth
bête en rut
a dit zut
à la pute

belzébuth
tout hirsute
sous sa hutte
a l’scorbut

on dit chut
plus de flute
ni de luth
c’est la chute
la culbute
plus de lutte
belzébuth
sans volute
parachute
azimut

mosquée bleue

entrée libre sans chaussures
dissimulées par la balustrade en bois
les femmes voilées prient au fond
un couple de touristes contemple son selfie
lui enturbanné elle cachée
ils sourient à leur image
d'autres lisent le coran
ou le routard je ne sais pas
ici comme ailleurs
les enfants jouent 
et pourtant

une lumière blanche jaillit
du vitrail meurtrière
forte implacable
personne ne la remarque

et si c'était allah
qui venait vous dire bonjour
ou vous sermonner
à genoux ingrats passants sur terre
repentez-vous de votre sourire niais
pleurez vos péchés et vos drames

mais personne ne l'écouterait
à cause des rites et des selfies
et le soir venu
plus de lumière
plus d'allah

l'homme seul face à son destin muré

fouiller la surface (1)

J’écris pour fouiller la surface indicible des choses et des gens, dans la sphère de l’invisible, au-delà des mots et des traces.

Mes mots ne sont pas des mots, ils sont le désir fou de rencontre entre âme et beauté, la volonté imparable de peindre l’hybride indiscernable de sentiments et d’émotions. 

Je ne sais pas crier, tout juste murmurer ma sincérité, mon désir. Immanents.

Je cherche à créer les rêveries d’un tableau abstrait, le foisonnement d’un paysage de recoins, la larme limpide d’un prélude en do majeur, les cieux aux nuages éclatés.

Je veux décrire les yeux transparents qui transpercent, la main douce poussant un soupir, la mort amère amer aimant, les rages de l’être à tous les âges, les folies de la vie torticolis.

J’écris pour me sauver de mes tourments, stopper leur cycle un moment : les voici suspendus en l’air par mes mots qui les empêchent de retomber ; d’un œil je les vois prêts à se ruer sur moi : alors je continue d’écrire en apnée, plongeant toujours plus loin dans un monde sans fin.

Quand j’écris, j’ai peur de mes mots microscopiques mais je continue, tant pis, porté par un espoir improbable, écharde de bois transocéanique, petit caillou à la fois dense et léger chassé par le vent, cerf-volant détaché de son fil qui tournoie en montant vers les nuages.

Mes mots forment une myriade de filandres fécondes, plus fortes que la matrice des heures, une kyrielle de notes frappant les cœurs des bouts du monde où je ne suis jamais allé.

J’écris pour lancer des passerelles entre les êtres, lignes de vie d’un bateau cherchant son cap. Je ne veux pas d’échelles ni de solutions, je veux des rêves et de la vibration.

Voile s’évanouissant à l’horizon, mon texte va m’abandonner; ayant gravé en moi un sillage profond, hors de ma vue, il vivra à jamais.

J’écrirai encore et encore jusqu’à ma mort et, ce jour-là, mes mots d’amour et d’or, je les serrerai contre moi, je les emporterai avec moi. Qui sait à qui ils pourront profiter…

Les nuages sauront-ils les aimer ?

(1er prix du concours Amavica - Mille poètes en Méditerranée - catégorie Prose poétique)

appel du vent

quand le vent des arbres et des champs
glissant par la fenêtre ouverte
se frotte à toi sans préambule
quand les mésanges piaillent
sous la bourrasque ébouriffante
quand le ciel te salue solennel
dans un nuage de feuilles alanguies
mourant en jouant

alors fou d'amour et d'orgueil
tu rêves d'union aux forces vivantes
tu embrasses l'air bourru
dans les hauteurs paresseuses

tu voudrais que l'esprit
expire un souffle vert
tu serais cet oiseau décidé
qui rit sans savoir où il va

mais la caresse a fui
virgule distraite
la nature immobile se tait
tout n'est plus que décor

en soupirant tu fermes la fenêtre
une fois de plus lourd indécis
tu ne t’es pas envolé
il aurait pourtant suffi de presque rien

suivre le sillon d'une larme
guetter l'effluve à paraître 
sur la nervure cambrée d'un tourbillon vivant
tendre les bras vers le ciel aspirant

mais qui sait un jour peut-être
tu ne resteras pas insensible à l’appel du vent

Les Ambésis 25 octobre 2013-6 décembre 2015

écho

elle est partie
ne laissant dans la maison vide que l’écho de ses pas pressés
un sillage invisible ses cheveux ondulants
les molécules d’un parfum chaud sa peau
le souvenir d’un murmure rauque sa voix chantante

elle est partie
et tout s'est arrêté
dans les vases les fleurs ne respirent plus
aux murs les tableaux penchés font grise mine
le piano ne frémit plus d’une corde
sur les étagères les livres s’affaissent dans la poussière
le chat se terre sous le lit
mais quand reviendra-t-elle

remplie de ses indices statufiés
momie ébahie
la maison vide retient son souffle
dans une chasse au trésor de l'amour
traqueur il cherche des pistes
comme la fumée est l’indice du feu
la larme qui glisse sur la joue
l'annonce de la souffrance
la trace de pas sur le sable
le reste de quelqu’un venu marcher là exprès
mais ici pas de marque sur le parquet de la chambre
et pourtant il y voit encore ses pieds nus de danseuse effleurer le sol
glissant comme sur un tapis roulant
mais quand reviendra-t-elle

partout où il tourne son regard
il ne voit qu’elle
comme s’il n’avait jamais habité ici
dans le salon c’est là qu’elle s’asseyait près de la fenêtre
souvent elle poussait la table d'un geste las
pour se rapprocher de la lumière du jour

sur le meuble se dessine encore un contour dans la poussière
là où trônait son ordinateur blanc
il clignotait la nuit comme un phare pour dire
dormez-bien jeunes gens je veille sur vos amis

dans la chambre il entend le lit gémir
du jour où il s'effondra de leurs jeux
il se souvient de l’air fendu
par ses lents mouvements de taichi
exécutés au pied du lit
où il paressait encore
et là tu la sens la cigogne qui prend son envol tu la vois
murmurait-elle dans une posture interminable
un film au ralenti
de son regard ensommeillé
il finissait par imaginer le grand volatile

aujourd’hui encore de ses yeux tristes
il devine une ombre chinoise dans l’espace vidé de ses gestes
rempli de son absence
l’oiseau s’est envolé dans les nuages
et le monde n’est qu’un néant d’objets sans âmes
mais quand reviendra-t-elle

tiens la voilà
elle était juste sortie acheter des cigarettes
le cinéma qu’on se fait parfois c’est dingue

le soleil est entré

le soleil est entré 
plein cadre 
par la fenêtre
comme s’il se croyait 
chez lui
il a déposé une tache 
sur le lit
et poussé sa route 
jusqu’au mur
le ciel du soir est presque blanc
ou gris très propre
bardé de nuages évanescents
sans vent
le chant de l’oiseau 
part en vrille
on lui répond là-bas
tout est immobile
moi aussi
je n’ose plus respirer
de peur de voir s'évanouir
cet instant de miracle
de sérénité de paix
par surprise
le soleil est entré 
dans mon cœur
juste avant de mourir

et le verbe s'est fait dans ta chair

et le verbe s’est fait dans ta chair
à partir de là
plus de jour ni de nuit
rien que le gris des lignes entassées
qui se mordent les unes les autres
méchantes superbes terrassées
bousculées par la touche entrée de ton clavier

tu écris fiévreusement pressé par le temps perdu
tu cherches à retrouver dans la jachère de ta vie
ces idées ces phrases sublimes inoubliables
après lesquelles tu courais sans te savoir oiseau de proie
et qui s’étaient envolées avant que d’exister

désormais plus rien ne peut t’arrêter
tu accouches tes mots comme une lapine pond
tu sculpte tes images en formes ciselées

il faut que tout soit parfait vite
précis et beau inédit
les mots se bousculent
ils ne t’ont pas attendu pour vivre
alors prends les tous
la folie est en toi
tu es en route
ton chemin d’écriture enfin
ta rédemption ton salut
plus que le bonheur la joie
l'accompli l'infini
écrire est le but de la vie

c'est surtout quand elle penche la tête

c’est surtout quand elle penche la tête
sur le côté
légèrement
un décalage dans la position
qu’il devient fou

dans le mouvement
ses cheveux déjà longs
tombent un peu plus
et ses yeux sombres
se plissent
avec un point d’interrogation
niché tout au fond

il suffit
qu’elle ait ce millimètre de geste
pour que son cœur vibre fort
il n’entend ni ne voit rien d’autre qu’elle
auréolée de sa grâce lumineuse chantante.

mon ami
si tu n'as jamais connu ce moment
tu n'as rien vécu
et tu peux aller pleurer sur les quais
personne pour te consoler

on dirait une pouliche qui se déhanche pour s’endormir
et la brume viendrait se répandre autour d’elle
pour la protéger du regard des hérons

on dirait un pont qui s’élance
suspendu dans le vide
et la circulation s’arrêterait pour le regarder

un jour elle était restée comme cela
si longtemps
à le contempler
qu’il avait cru à un torticolis
elle se demandait simplement qui il était au fond

comme s’il le savait

il aurait du dire
le trop plein de son cœur
et sa tête qui cogne
au lieu de rester muet
benêt souriant

alors après cette éternité figée sans réponse
elle avait soupiré redressé la tête et disparu
ses pieds effleurant à peine le sol
fantôme au cœur tendre déçu
il n’avait entendu que ce soupir à l’affreuse douceur

aujourd’hui encore il résonne dans sa tête
comme un crissement sourd
tandis qu’il la cherche
désespéré
dans les rues du monde entier
Conseil: une fois sur les poèmes, passez d'un texte à l'autre avec les flèches du clavier