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la voix de l'invisible

je suis le courant abyssal 
portant la mer sur ses épaules
je suis la rosée du matin
avant sa première perle
je suis la racine de l’arbre 
qui le pousse vers le ciel
je suis le murmure des feuilles
pénétrant la peau
comme une perfusion de douceur

mon pollen donne la vie à tout être
qui veut la goûter
mes parfums enivrent les âmes
unies dans le même souffle
ma tristesse façonne l’esprit
pour le fortifier
mes désirs vibrent à l’unisson
comme les cordes d'une harpe
mes ondes créent l’arc-en-ciel de lumière
sur la voûte du chemin

je suis le vent de toutes les colères
et de l’amour aussi
je suis l’aiguille de l’horloge des cœurs
et quand mes rêves construisent 
la réalité du silence
je suis l’impossible pensée avant les mots

je suis le destin la peur 
la mort
je suis la beauté 
née avant toute chose
avant même 
la gravité de l’univers

Voir mise en scène dans Galerie Amavero.

aux pages citoyens

circulez y’a rien à voir
balayez-moi tout ça
notes futiles grinçantes
phrases inutiles trébuchantes
tableaux de mensonges
à quoi ça sert tout ça hein
rien que du temps perdu

taisez-vous
pas de sons pas de mots
ne parlons même pas des dessins
n’y pensez plus
et d’ailleurs
ne pensez plus
ou plutôt 
ne pensez rien
qu’on ne vous dise de penser
c’est à peine 
si vous avez le droit
de respirer 

allez ouste
mots notes
images croquis
pensées
tous à la poubelle
et qu’on retrouve enfin
de belles pages blanches
comme des plages sans touristes
et sans parasols
et surtout vides vides
débarrassées des parasites
venus d’on ne sait où
de derrière les mesures 
et les points d’exclamation
armés de bécarres
ou d’allégories les gueux

- mais la nuit
dans le noir
ils viendront
les parasites
comme des rats affamés
des serpents à sonnettes
les sans papier
les sans note les sans mot
ils se glisseront dans vos rues
et pendant que vous dormirez
ils fouilleront dans vos poubelles
derrière vos murs et vos maisons
pour s'enfuir avec des trésors
de sens et de beauté
dont ils feront des étendards
de toutes les couleurs
armes de la victoire finale
sur la fatalité

aux pages citoyens
noircissez-les

Texte de Luc Fayard inspiré par l’actualité de ce fabuleux dessin des balayeurs de notes , probablement sur une partition d’Eugène Ketterer, dessin dont je n’ai pu retrouver la source ; si vous l’avez, donnez-la moi s’il vous plait, j’ai horreur de publier sans sourcer. Merci. 
Voir la mise en scène dans Galerie Amavero

mystère de la création

il y a longtemps
dans une haute tour 
accrochée au ciel
le monde fut créé
par une femme
délicate et pensive

attachée à son labeur
telle une tisserande à son métier
elle dessinait avec bonheur
d’étranges et beaux objets

chaque jour chaque nuit
la lune et le soleil l’aidaient
en posant de fins rayons
d’ombre et de lumière
sur sa planche à dessin

son violon amoureux
jouait pour elle 
des airs envoûtants
qui deviendraient plus tard
la première symphonie 
des chants du monde

les notes émurent les esquisses
alors la forme vivante fut
d’abord les oiseaux 
qui s’envolèrent à tire d’aile
puis vint tout le reste 
de la grande arborescence
des plantes et de l’eau
animaux et hommes
poussières de vie
s’égayant dans le vent

souriant de tant de beauté 
et d’harmonie
la mère de la création 
heureuse et solitaire
vécut longtemps
améliorant jour après jour
les fruits de son âme
entourée de robots fidèles
gardiens de son alchimie

quand elle mourut 
tâche accomplie
le monde sur sa lancée
continua de tracer 
sans elle
son cercle fini
infiniment répété

mais un jour advint
ce qui devait advenir
sans sa matrice 
ni son sourire
l’homme se crut 
le roi du monde
et ce fut le début 
de la fin du monde

Texte: Luc Fayard
inspiré de La Création des Oiseauxde Remedios Varo; voir la mise en scène en récitation musicale de poésique sur instagram @lucfayard.poete et dans Galerie Amavero

Korax

Moi, j’aimerai être un corbeau,
premier initié du dieu taureau,
tout droit venu d’Orient,
directement de l’ancien Iran.

Moi, j’aimerai être corbeau,
Initié dans le respect
des secrets de ces solides
amitiés

Moi, j’aimerai être corbeau.
Mithra ne veut pas
qu’on parle de tout ça.
Être sans voix
Fait donc de moi un roi

Mis en scène dans Galerie Amavero
Texte : Hugo, poète sans voix #hugopoetesansvoix
Inspiré de : Cop 27 – Autoportrait, de Jam -  Toile sur chassis -  Techniques mixtes fusain, encre, acrylique, café - 30 x 40 cm - https://jam.creative-diffusion.com/

rester debout

un beau jour 
vous trouvez une ruche de chaises
ce n’est pas comme les abeilles
vous ne pouvez rien en faire
pas de jus pas de substance
pas de pollen sur le bois
juste un vieux goût de cire
rien que le craquement du vent 
dans les barreaux branlants
elles sont là inertes
brinquebalantes
et vous vous dites
c’est çà la vie

un beau jour 
il en eut assez
trop de chaises chez lui
il commença à les jeter 
sans regarder par la fenêtre
mais elles refusèrent de mourir
et s’accrochèrent les unes aux autres
jusqu’à former un gros nid de chaises
les pompiers essayèrent 
tous les produits toxiques
mais ils n’avaient pas
d’extincteur de chaises

un beau jour 
la chaise reine
chauffée par le soleil de la terrasse
pondit quelques œufs de chaise
qui finirent par éclore
dans la lumière du printemps
mais une chaise grandit très vite
en quelques mois ce fut une colonie
qui déborda sur la façade
et descendit sur le mur
bientôt elle gagnera la rue
et se répandra dans la ville

un beau jour 
il se dit penaud
ne restons pas assis
s’asseoir est une perte de temps
le corps se tasse
l’esprit aussi
il enleva tous les meubles
les tableaux les réveils
et même les lits
il passa le reste de sa vie
debout dans l’espace nu
mais heureux

Texte de Luc Fayard, inspiré de Photo AFP. Une création de l’artiste Tadashi Kawamata sur la façade de l’immeuble de la Galerie Liaigre.

chantier

pas d’obstacle
à la création
tout est chantier
mortier
cœur idée
l’âme expose
ses visions
blocs et lignes
s’épaulent
traits et couleurs
s’enrichissent
l’élan est là
tout s’élève
tout s’en va
ailleurs
et s’imprègne

taille directe

prendre la matière
telle qu’elle est
suivre son idée
rêve de tout artiste
musicien ou poète
peintre ou sculpteur
parler en ligne droite
à l’âme au cœur
une pensée éphémère
façonne une vie durable
espérant au fond d’elle
que l’esprit sera visible
derrière la forme

vous les vibrants

vous les vibrants les sensibles
scrutateurs d’infinis
voyants férus d’autres vies 
liseurs d’âme entre les lignes

vous détenez en vision
l’arc-en-ciel de lumière
qui éclaire dans votre œuvre  
les au-delàs d’horizon

vous en faites un bel usage 
toujours renouvelé
comme bat des ailes 
un papillon inépuisé

votre passion
avancer sans barrières
sur un chemin d’ornières
de creux d’irraison

vous y dansez libres passereaux 
inlassables chercheurs de beauté
notes matières traits couleurs mots 
vos ailes vos cris pour exister

truelles de l’origine du monde
flèches vives de l’espace et du temps
avec vous la terre n’est jamais ronde
ni le ciel frontière fermée au vent

derrière votre forme façonnée
le souffle naturel des choses
porte dans son cycle éternel
le voyage recommencé

vous êtes la houle et le sang
qui nous reconstruisent vivants
nous gens du passé fétus tristes
vous gens du futur les artistes

à la princesse I.M. et à ses pairs
Conseil: une fois sur les poèmes, passez d'un texte à l'autre avec les flèches du clavier