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oublier le temps

tu sens le temps vibrer en toi 
comme un moteur chaud
à soubresauts incontrôlables
mi horloge mi comptable
et toujours à contre-temps

c’est comme si
au lieu de frémir
l’eau courait tel un zèbre
qui se tortille et se cabre
au lieu d’aimer
le cœur emballé froissait
les souvenirs pêle-mêle
dans un grand tintamarre
au lieu de s’élever dans le ciel
le nuage aplatissait sur l’horizon
ses formes alanguies

c’est comme si
au lieu de pousser la vie
le vent jouait avec les feuilles
pour les énerver
et ça monte et ça descend
et ça part en vrille
comme le fait ton âme 
avec tes sentiments
coincés dans la grille
de tes préjugés

le temps maître de l’univers
implose sans bruit
noircit comme un orage fou
fuit avec la pluie
se lisse paresseusement
comme un enduit mou

tu es pris au piège 
de l’avant-après
rien n’existe sans lui
même pas la poésie
ni la mémoire

tu voudrais l’arrêter 
profiter de l’instant magique
il te glisse entre les doigts
tu voudrais avancer
franchir une étape
il te bloque sans préambule
à un carrefour cornélien
où tu resteras interdit
prisonnier de ton petit corps
dans l’interminable indécis
qui va de la vie à la mort

n’écoute pas  les faux maîtres du temps
vendeurs de vent
gourous moins naïfs que toi
la solution existe 
secrète et fluide
fais silence 
entre au fond de toi
ne pense plus à rien 
respire

et quand tout sera 
calme limpide
dehors et dedans
tu auras oublié le temps

Texte de Luc Fayard illustré par Silence of the Ravine, d'Ethel Walker; voir Galerie Amavero; voir aussi sur instagram.com/lucfayard.poete
NDLR: Une femme nue pour illustrer la contrainte du temps et la nécessité de s'en libérer, pourquoi pas? Il y a dans ce tableau un calme intemporel, une attitude de contemplation, de libération, de pause dans le temps, de beauté pure et intemporelle.... qui vont bien je trouve avec le texte...

simple fouet

froid comme la pierre
souple comme l’esprit
dense comme la vie
aligné comme une galaxie
remplir son être de souffle
des yeux partout
tout entendre
le moindre tressaillement
clignement
et quand c’est décidé
bloquer son poignet vers le bas
dans un crochet implacable
pousser des deux bras
en sens inverse
comme pour atteindre
le bout du cercle
le pousser encore plus loin
faire grandir la nature
de son être intime
sans rien montrer
sans un signe
par ce mouvement
du simple fouet
toute adversité disparait
il ne reste que du blanc
et le silence

Texte : Luc Fayard
inspiré de 
Simple fouet, sculpture de Ju Ming
(Place Victoria à Montréal)
à voir illustré dans Galerie Amavero
Conseil: une fois sur les poèmes, passez d'un texte à l'autre avec les flèches du clavier